Élitisme

Attention à ne pas faire d'anti-élitisme.
Toutefois cela ne dispense pas de constater que nos élites sont des gens comme tout le monde.
Ils
luttent âprement pour obtenir les places, surtout celles qu'ils ne méritent pas, défendent celles qu'ils obtiennent et les rendent quasi héréditaires puisque seuls sont élites les enfants de ceux qui le sont déjà.
C'est naturel quoique féodal.
Je ferais tout de même une distinction entre les poli­tiques et ceux qu'on appelle d'un terme très mauvais, les in­tellectuels.
Les politiques évoluent dans un véritable champ de bataille et on ne voit pas comment ils pourraient ne pas, eux-même
s, combattre avec tous les moyens disponibles.
Pour les intellectuels, c'est autre chose. Leur légitimité, c'est la pensée, c'est-à-dire la vérité. Leurs armes sont la ré­flexion, la méditation, le raisonnement, le dialogue dans le seul but de fournir des lumières. Mais dès lors qu'ils veulent devenir conseiller du Prince, ils doivent faire comme les politiques : manœuvrer, intriguer, fausser les choses, composer avec la science et, surtout, écarter les voix discordantes.
Il leur faut contrôler les voies d'accès aux postes et pour cela divers mécanismes sont en place. Par exemple, l'accès aux médias ou à l'édition est rendu extrêmement difficile, voire impossible aux nouveaux entrants. Il faut barrer la route à ceux qui seraient capables de devenir élite et par là on comprend la charge de Danièle Sallenave contre le développement de l'autoédition (ici). C'est le phénomène dit de l'entre-soi. Je l'ai bien vu à l'Université où les étudiants recherchent les directeurs de thèses les plus influents, qui pourront les faire recruter comme maîtres de conférences et ils choisissent des sujets de thèses sur des thèmes à la mode. Ils apprennent vite à parler en flatteurs. Dans ce mécanisme, la science et la culture ne peuvent que se perdre. J'ai connu des directeurs de thèse qui se vantaient de « diriger » plus de cent thèses !

Il reste, bien entendu et heureusement, des penseurs au­tonomes, mais ils n'ont qu'un accès difficile aux médias ou à l'édition.

Alors que faire ? Rien. Rien n'est possible et ce phéno­mène de captation de tous les pouvoirs et de tous les lieux d'influence, comme, sur le plan économique, la concentra­tion de la richesse entre des mains de moins en moins nombreuses s'observe dans tous les pays. C'est un mécanisme de féodalisation.

Pas d’anti-élitisme, cependant, mais au moins tentons d'obtenir que les charges ainsi redevenues vénales ne restent pas crypto-héréditaires...