Que veut-on faire dans les écoles ?
Faut-il faire de la question du genre une cause nationale, plus urgente que celle du chômage ou de la formation professionnelle ?
Aller dans les écoles, obliger les maîtres à expliquer aux enfants, pré pubères donc, qu’ils ne sont peut-être pas aussi garçon ou fille qu’ils le croient et que de toutes les façons, cela ne doit pas les empêcher de vivre leur sexualité autrement et même changer de sexe s’ils le souhaitent ? Le leur suggérer (pour le coup il s’agit bien d’une suggestionau sens psychologique) ? Les mettre dans le doute à cet âge ?
Il faut bien comprendre de quoi il s’agit. Expliquer aux enfants que papa fume la pipe pendant que maman fait la vaisselle, est une chose. Critiquer cette image n'est que lutte contre le sexisme. Leur mettre dans l’idée un doute quant à leur sexe, en est une toute autre.
Un tel « enseignement », à défaut d'être utile, est-il psychologiquement supportable pour les enfants ? Voilà qui mériterait d'être approfondi !
De plus, un tel « enseignement » est-il réalisable pour les maîtres ? Qui oserait aller perturber ainsi en profondeur chacun des élèves de sa classe en lui disant, en substance : "toi, tu es un garçon, mais peut-être pas autant que tu crois" ? Et que ferait-on des enseignants « objecteurs » de conscience ? On les contraindrait ?
À supposer qu’un tel « enseignement » soit finalement possible, qu’en espère-t-on ? Réduire les cas de dysphorie sexuelle ? Ou bien, au contraire, les multiplier ?
Prendre en considération les – rares – cas de dysphorie sexuelle est une (bonne) chose ; créer des problèmes chez ceux qui n’en ont pas en les culpabilisant de se trouver bien d’être ce qu’ils sont, en est une tout autre, dont la justification est loin d'être évidente.
Une stratégie de brouillage de la sexualité
Il faut bien faire attention au vocabulaire. Il est probable qu’au début on ne voudra que lutter contre le sexisme. Mais on introduira le mot « genre » et ce mot fera venir avec lui toute la stratégie de brouillage de la sexualité.
À vrai dire, pourquoi pas ? Si la sexualité contrainte par le genre bride la liberté, voilà une libération qui pourrait être bienvenue, comme le sont toutes les libérations. Mais si telle est l’intention, elle doit être clairement énoncée. On ne libère pas subrepticement. La manœuvre politicienne qui consiste à faire passer derrière une cause juste, une intention masquée est une manipulation indigne qui mérite d'être dénoncée. Si l’on estime que nos enfants doivent pouvoir choisir, le moment venu, d’être fille, garçon, l’un ou l’autre, l’un et l’autre, ni l’un ni l’autre, alternativement l’un puis l’autre ou toute autre combinaison que l’imagination peut élaborer, il faut le dire et mettre la proposition en débat.
L’école, cœur de stratégie
Ce qui est suspect, ce n'est pas la théorie du genre. Cette théorie est sérieuse et parle de quelque chose de bien réel. Ce qui est suspect, c’est la volonté des partisans du « genre » d’utiliser l’école comme vecteur de la transformation des mœurs et pratiques sexuelles. Après une école qui n’enseigne plus, voilà l’école qui détruit… comme disait Butler (Samuel et non Judith) et que rappelle un récent article du Monde : « Après tout, peut-être vaut-il mieux pour le pays que l’école empêche le développement de la pensée au lieu de la favoriser. »
L’éducation se croyait fondée à tenter faire coïncider l’identité sexuelle avec la conformation naturelle. Cela paraissait sagesse et c’est certainement de cette manière que se poseront le moins de problèmes sociaux et psychiatriques. L’insinuation d’un doute sur son propre corps généralisée à toute la population peut en revanche conduire… allez donc savoir où.
Voilà un activisme qui ressemble fort aux mouvements de dépénalisation de la pédophilie d’il y a quelques dizaines d’années. Bien des intellectuels s’y sont laissé prendre qui ont abandonné cette position quelques années plus tard quand les dégâts causés par la pédophilie ont été connus.
Restons sur l’idée philosophique que la reconnaissance de l’égale dignité du masculin et du féminin suppose qu’on soit indifférent au fait d’être l’un ou l’autre… Ni les âmes, ni les esprits ne sont sexués.